240 millions d’années de l’histoire du bassin méditerranéen viennent d’être déterrées. Dans ce long récit, les chercheurs ont trouvé les traces d’un ancien continent nommé « Grand Adria »
« Les écrits disent que votre cité détruisit jadis une immense puissance qui marchait insolemment sur l’Europe et l’Asie, […] il s’y trouvait une île devant ce détroit que vous appelez les colonnes d’Héraclès (détroit de Gibraltar). Cette île était plus grande que la Libye et l’Asie réunies. » Extrait du Timée de Platon
Tout l’imaginaire de l’Atlantide commence ici. Longtemps considéré un fantasme. Mais une étude récente publiée dans la revue Gondwana Research révèle l’existence passée d’un continent de la taille du Groenland en mer Méditerranée.
Détaché du continent originel du Gondwana il y a environ 240 millions d’années, il aurait migré vers le nord et serait entré en collision avec ce qui est aujourd’hui l’Europe. Serait-ce la fameuse île mythique décrite par le philosophe Platon ? Aurait-elle glissé sous le continent au lieu d’être engloutie par les eaux ? Belle histoire, sauf que ça coince au niveau de la chronologie. Même en le secouant bien, l’arbre de l’évolution ne fait pas arriver d’hominidés avant 7 millions d’années alors que cette Atlantide disparaît vers -120 millions d’années, soit bien avant l’apparition de notre espèce. Déçus ?
C’est la tec-to-nique du géologue
« Grand Adria » n’en reste pas moins mystérieux. Son histoire a été tumultueuse et fortement bousculée par le jeu de la tectonique des plaques. Tout comme le bassin méditerranéen, d’ailleurs ! Et pour cause, ce dernier est au carrefour de trois plaques tectoniques, la plaque africaine, la plaque eurasiatique et la plaque arabique. Grand Adria fait partie de la plaque africaine. Moins dense que la plaque eurasiatique, l’ancien continent a glissé sous elle. La collision, qui s’est produite à une vitesse estimée de 3 à 4 centimètre par an, l’a brisé et a envoyé la quasi-totalité dans le manteau terrestre.
Un puzzle 3D à reconstruire
Il aura fallu pas moins de 10 années d’enquête pour retrouver les pièces du puzzle disséminées dans plus de 30 pays, de l’Espagne à l’Iran. Les indices ? L’âge des échantillons et la direction des champs magnétiques gardés en mémoire dans la roche. Sacré challenge quand tout est courbé, cassé, et empilé. La reconstruction de l’histoire de la méditerranée n’a été rendue possible que grâce à un logiciel de modélisation numérique 3D. Une première du genre.
Quand le numérique joue les historiens…
Sophie Nicaud
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