Chez les femmes enceintes, les bouleversements hormonaux et corporels favoriseraient le désir sexuel, notamment au deuxième trimestre. Pour autant, grossesse rimerait plutôt avec sexe en baisse. Qui dit vrai ?

Les seins qui gonflent, le corps qui prend le pas sur l’intellect, les hormones toutes chamboulées, l’instinct et les sens en ébullition… Il est assez courant d’associer à la femme enceinte des appétits majorés et désirs sexuels décuplés.

D’un point de vue physiologique, pour justifier ce pic de libido, un des facteurs les plus cités par les études portant sur la grossesse et la sexualité (*), est celui d’une augmentation de la congestion sanguine pelvienne. Sous l’effet des hormones, l’afflux de sang serait plus important dans la zone pelvienne, qui comprend le vagin et exacerberait ainsi l’excitation sexuelle. Chez certaines femmes, les tensions mammaires et une forme d’hypersensibilité des seins, participeraient à ce regain de libido.

Le taux élevé d’œstrogènes influence le désir

L’augmentation du taux d’œstrogènes, soit les hormones produites par les ovaires et ayant une action favorisant le désir, pourrait de même être l’un des facteurs de cet envol d’envies charnelles. A nuancer toutefois : pendant la gestation, le taux de progestérone, hormone peu propice à la libido, lui, reste important. Certaines femmes seraient de ce fait plus sensibles à l’augmentation du taux d’œstrogènes ou de progestérones.

Enfin, certaines femmes enceintes, réjouies de leurs courbes plus généreuses, se sentent plus féminines, attirantes et débrident leurs envies. Pour toutes ces raisons, certaines femmes atteindraient même durant leur grossesse plus facilement l’orgasme.

Une libido exacerbée surtout entre le premier et le troisième trimestre

Pour autant, la réalité ne s’avère pas aussi sexy pour toutes les femmes et durant les neuf mois de grossesse. Il ressort en effet que cette libido est plus spécialement exacerbée durant le deuxième trimestre de grossesse.

Sur un plan physiologique, lors du premier trimestre de gestation, beaucoup de femmes, en proie à des nausées, à de la fatigue, à de la somnolence, etc. auraient peu de cœur pour des ébats sexuels. La crainte, également, pour certaines, de faire une fausse couche refrénerait, si ce n’est la libido, les rapports sexuels.

De même, au troisième trimestre, l’inconfort physique dû à la proéminence du ventre, le souffle court, les jambes lourdes…, ou la peur (erronée mais qui persiste) d’un accouchement prématuré ou de « faire mal au bébé », qu’elle sent désormais bouger, mettraient le holà aux effusions charnelles.

Une image de soi dans la balance d’Éros

Il existe de fait autant de sexualité qu’il y a de femmes et de couples. Beaucoup de paramètres entrent en jeu pour faire surgir le désir :  le contexte, par exemple si elle doit s’occuper de ses autres enfants, de son âge, de l’histoire du couple et de son ancienneté, de ses croyances religieuses, etc.

Parmi l‘un d’eux, l’image de soi pèse grandement dans la balance d’Éros. Certaines peuvent ainsi avoir moins de désir, être mal à l’aise face aux changements subis par leur corps (acné, vergetures, prise de poids) ou craignant que le regard du partenaire n’ait changé. L’attitude du partenaire, lui-même en proie à ses propres représentations ou croyances, n’est pas anodine. Ainsi, parfois même si la libido est bel et bien au rendez-vous chez la femme enceinte, elle ne l’est pas toujours chez son ou sa partenaire.

Des rapports pas si sexy…

D’après les études menées notamment au sein des Écoles de sage-femme des Universités de Nancy, d’Angers et Metz, il ressort, au final, que la fréquence des rapports sexuels diminue durant la grossesse. Même le supposé rebond d’appétit sexuel du 2e trimestre ne se traduirait guère en rapports plus fréquents.

Il serait également démontré une diminution de la satisfaction sexuelle durant la grossesse. Les sages-femmes, qui pointent un vrai besoin d’informations des femmes enceintes sur ces questions, rappellent ainsi que la pratique d’actes sexuels durant la grossesse est à très faibles risques (les contre-indications sont rares) et combien continuer à faire l’amour, pendant sa grossesse, est source de bien-être physique et émotionnel.  

Marianne Peyri

Sources (*) :  
– Justine Lorson. Sexualité et grossesse… : quand 1+1=3. Médecine humaine et pathologie. 2001.
– Elodie Thomas. La grossesse a-t-elle une influence sur la sexualité des femmes enceintes ? : revue systématique de la littérature. Médecine humaine et pathologie. 2019.
– Marie-Sophie Agbahoungba. Grossesse et sexualité érotique‎ : étude qualitative, observationnelle et multicentrique à propos de la place accordée à la sexualité érotique pendant le suivi de grossesse par douze sages-femmes libérales mosellanes et Meurthe-et-mosellanes. Human health and pathology. 2020.
– Solène Gaboriau. « Modifications des pratiques sexuelles pendant la grossesse chez la femme », 2013.

Avec le soutien du ministère de la Culture

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