On aime bien dire cela pour se faire du mal : les Français sont nuls en langues. Et on le dit d’autant plus facilement qu’on speak well english. Pour autant, ce n’est pas si évident. Ni entièrement faux non plus

En 2012, l’étude européenne Surveylang a mis un bonnet d’âne à la France. C’est l’avant-dernier pays d’Europe en matière de maîtrise de la première langue étrangère, avec 14% des élèves de fin de collège qui atteignent le niveau attendu en première langue contre une moyenne européenne de 42%. Un seul pays fait plus mal et c’est… l’Angleterre avec 9%. Si on se contentait de ce chiffre brut, c’était nul. Mais si on analyse plus profondément, on constate que la France fait moins bien dans la première langue mais la Suède, qui arrivait largement en tête pour sa réussite en LV1 (pour la faire courte, en anglais) avec 82% arrivait aussi dernière en maîtrise de la LV2. Alors que la France s’en sortait plutôt pas mal avec une LV2, majoritairement l’espagnol, qui est une langue romane.

Motivation et romanité

Voici deux raisons pour lesquelles les Français ont tendance à traîner la patte en langues. D’abord, et l’exemple anglais est frappant, parce que pour apprendre une langue correctement, il faut avoir une bonne motivation. Les Anglais ne font aucun effort car ils savent que leur langue est parlée partout. A un degré moindre, avec une langue qui était la langue internationale jusqu’au début du XXème siècle, les Français ont longtemps campé sur cette position.

Par ailleurs, les études internationales quand elles parlent « langues » parlent essentiellement de la maîtrise de l’anglais. Une langue germanique qui, de par sa structure et sa logique profonde, est proche des langues des « bons élèves » en langue : pays scandinaves, Pays-Bas et Allemagne. Les pays « nuls » en anglais sont d’ailleurs, après nous, les Belges, Polonais et Espagnols. Tous des pays dont la structure linguistique est très différente de l’anglais.

Même chose selon une étude d’Eurostat sur la maîtrise des langues (le pluriel est important). Ceux qui ne maîtrisent aucune langue étrangère sont 39,9% en France et 35,4% en Europe. Bonnet d’âne ? La Grande-Bretagne (65,4%) qui contribue pas mal à faire monter la moyenne. Mais quand on parle de maîtriser deux langues étrangères, les Français sont 20,1% dans ce cas pour une moyenne européenne à 21%. Pas si mal.

Amélioration constante du niveau en anglais, espagnol et allemand

Et ça s’améliore. Dans son dernier rapport, le CNESCO (Conseil national d’évaluation du système scolaire) souligne que même si la France a pris du retard historiquement dans l’apprentissage des langues en primaires, il est désormais un de ceux qui proposent le plus d’heures en langues au cours de la scolarité. Et de fait, entre 2004 et 2016, le CNESCO a constaté une amélioration constante du niveau en anglais, espagnol et allemand.

De nombreux organismes soulignent par ailleurs la bonne volonté des Français à apprendre. Un pays entravé par des handicaps structurels, notamment le monolinguisme historique qui nie ses langues régionales depuis deux siècles. Or, pour maîtriser des langues, il faut déjà avoir l’oreille exercée à des sons différents. Et oui, le manque d’habitude des sons exotiques serait l’une de nos plus grosses failles.

D’autant que le français émet des sons dans une zone de fréquence restreinte, l’une des plus restreintes de toutes les langues, entre 1 000 et 2 000 Hz. Alors que l’anglais est émis entre 2 000 et 12 000 Hz. Et les langues slaves entre 125 et 18 000 Hz. Bien sûr, on perçoit ces fréquences, la perception humaine va de 20 à 20 000 Hz. Mais comme nous y sommes moins habitués, il faut un léger temps de décalage pour la saisir. Et c’est dans cette légère gêne que s’inscriraient les difficultés des Français à bien parler les autres langues.

Une hypothèse séduisante qui nous déculpabilise mais qu’une étude internationale (sans Français) a remise en cause, estimant que la moyenne des sons n’était pas si éloignée que ça d’une langue à l’autre. Alors si en plus nous n’avons d’excuses…

Jean Luc Eluard

Avec le soutien du ministère de la culture

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