En 2018, une étude publiée dans Nature climate change révélait que le tourisme était responsable de 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Pour obtenir ce résultat, les scientifiques ont étudié 160 pays entre 2009 et 2013
Cela ne fait plus de doute, le tourisme est néfaste pour l’environnement. L’étude scientifique publiée en mai 2018 dans Nature climate change est claire : le tourisme est responsable de 8% des émissions de gaz à effet de serre. Jusqu’à cette étude, seuls les transports étaient pris en compte, les scientifiques ont ajouté les émissions produites par l’hébergement, la nourriture, les achats de produits « touristiques ».
Et la croissance des émissions est exponentielle. Elle est passée de 3,9 milliards de tonnes en 2009 à 4,5 milliards en 2013 et les projections pour 2025 étaient alors de 5 à 6,5 milliards. La pandémie et l’augmentation des prix des carburants ont légèrement freiné cette estimation mais la tendance est réelle.
L’influence du tourisme sur le monde ne date pas d’hier. Déjà, au XIXe siècle, sous l’effet de l’essor du thermalisme, une ville comme Bath en Angleterre se retrouvait complètement transformée pour répondre aux exigences de la clientèle riche.
C’est après la Seconde Guerre mondiale que l’élargissement du concept de tourisme aux classes moyennes rend le problème accru. L’expérience d’épanouissement devient un business lucratif. L’aménagement de la côte languedocienne dans les années 70 pour permettre de délester la côte d’Azur et d’offrir des vacances pas chères est devenu l’exemple tragique d’un aménagement réussi économiquement mais désastreux pour l’environnement. De Port-Leucate à la Grande-Motte, l’artificialisation des sols a augmenté les risques naturels (en particulier la submersion marine) et 22% de la côte languedocienne est désormais atteinte par l’érosion marine.
La France, première destination
De 25 millions en 1950, le nombre de touristes internationaux a franchi la barre symbolique du milliard en 2012. Et la France reste la première destination mondiale avec entre 8 et 9% du total chaque année. De fait, le simple transport touristique représente 8% des émissions de gaz effet de serre des transports nationaux.
Avec des conséquences désastreuses sur l’environnement, que ce soit la pollution par les déchets, les pollutions visuelles ou sonores, ou encore l’érosion par piétinement. C’est ainsi que la région PACA ou Porto-Vecchio en Corse ont décidé de ne plus promouvoir les sites les plus connus. Les pouvoirs publics ont demandé également aux influenceurs de ne plus « vendre » certaines destinations particulièrement « instagramées ». Et la ville de Paris a créé un programme pour diriger le tourisme vers les quartiers moins connus plus loin de son centre.
Pour autant, la prise de conscience des méfaits du sur-tourisme est tardive en France comme le reconnaît l’Alliance France Tourisme. Un sondage met en lumière que seuls 3% des Franciliens sont réfractaires au tourisme contre plus de 20% à Venise ou Amsterdam. Ce n’est que mi-juin de cette année 2023 que le gouvernement a alerté sur le problème et décidé de créer… un observatoire. Le but : obtenir des données sur le problème et notamment définir ce qu’est le sur-tourisme et à partir de quand il est avéré.
Le Mont-Blanc en surchauffe
Pire même : à l’instar de l’Everest qui tend à devenir la plus haute poubelle du monde, des lieux que l’on croyait à l’abri de la surfréquentation par leur difficulté d’accès sont devenus eux aussi saturés. C’est ainsi que l’accès au Mont-Blanc par la voie normale est désormais réglementé.
Symbolique de la difficulté de créer des « permis d’accès », on a décidé qu’il serait impossible de grimper le mont sans une réservation dans l’un des refuges. Leur capacité étant limitée, cela limite automatiquement le nombre de candidats à l’ascension mais sans le dire officiellement. C’est toute la difficulté de la gestion du sur-tourisme : comment continuer à engranger des bénéfices sans étouffer ce qui les génère. A savoir des lieux à l’écosystème qui pâtit de ce mercantilisme.
Jean Luc Eluard