Rouge sur blanc, tout fout le camp, c’est bien joli, mais ça concerne uniquement le vin. Pour les vendanges, on est plutôt dans « rouge sur blanc, ça roule normalement ».
Car, en Bordelais, si on vendange généralement le blanc avant le rouge, c’est pour une question de maturité : les cépages de blanc sont mûrs avant les autres. C’est aussi une question de goût : les vins blancs secs sont moins alcoolisés que les rouges. Or, c’est le sucre contenu dans le raisin qui, en fermentant, va se transformer en alcool. Plus le raisin mûrit, plus il se charge en sucre et donc plus il est alcoolisé. Raison pour laquelle ce qui se pratique en Gironde, où le sec est très sec, n’est pas forcément la règle générale.
En Alsace, par exemple, la récolte des raisins blancs commence à partir de la fin de septembre ou à la mi-octobre en fonction des années. Certes, on est plus au nord et les grappes mettent plus de temps à mûrir, mais c’est aussi parce que les vins alsaciens, même secs, sont plus doux. Sans parler des « vins de glace », spécialité canadienne (mais pas que…), pour lesquels on récolte en décembre-janvier, une fois que le gel fige l’eau et concentre l’alcool.
Pour autant, tout ceci est bien joli, mais on ne décide pas de la date des vendanges à pile ou face. Généralement, on la fixe à cent jours après la floraison de la vigne, mais cela peut changer de quelques jours en fonction des conditions climatiques qui ont prévalu pendant le printemps et l’été. C’est le préfet qui, après consultation des organisations de producteurs, publie dans chaque département le ban des vendanges, date d’ouverture de la récolte, suite à quoi chaque producteur décide s’il démarre ou pas en fonction de ce qu’il souhaite obtenir.
Quoi qu’il en soit, pour obtenir un même résultat, il a fallu avancer les vendanges d’environ un mois, en moyenne, depuis cinquante ans. En cause, le réchauffe- ment climatique, qui fait mûrir le raisin de plus en plus tôt, et l’augmentation du CO2, qui modifie la flore microbienne. En gros, la récolte commençait vers le début d’octobre en 1950 mais plutôt au début de septembre (voire à la fin d’août les années chaudes) dans les années 2000. Les vendanges sont d’ailleurs un bon marqueur de l’évolution du climat, puisque leur date de commencement a été utilisée par l’historien Emmanuel Leroy-Ladurie comme un repère pour son travail sur l’histoire du climat depuis l’an mil. Il ne reste plus qu’à espérer qu’on ne vendangera pas bientôt pour le 14 Juillet… ça gâcherait le défilé.