Les lecteurs attachés aux symboles savent que la vigne est celui de l’immortalité. Elle tire cette force symbolique dans la tradition judéo-chrétienne notamment, où elle apparaît cultivée par Noé après le déluge. Et en véritable « arbre de vie » dans de nombreuses cultures. Mais, plus prosaïquement, la vigne est-elle vraiment immortelle ?
Ce végétal qui, à l’état naturel, n’est qu’une liane de plusieurs mètres peu ou pas fructifère, doit être taillé pour donner ses plus beaux fruits. Et comme elle est cultivée pour ses baies, forcément, on s’attend à ce qu’elle soit régulièrement remplacée pour garder sa productivité. Mais la vigne n’est pas une bête plante annuelle que l’on remplacerait comme on sème des carottes. Elle atteint un bon rendement autour de 10-15 ans. Il faut alors la bichonner pour la faire durer le plus longtemps possible. Si le bon vin se bonifie avec l’âge, il en est de même pour la vigne. Et c’est pourquoi la mention « Vieilles vignes » fait florès sur les étiquettes des bouteilles.
Car si la production d’un pied de vigne diminue passé 20 ans, le jus tiré n’en devient que meilleur, plus concentré, avec des tannins plus charpentés et un bon équilibre. Au-delà du siècle d’existence, la vigne peut encore produire du vin. Un âge assez méconnu par le consommateur car elle est évidemment sujette aux maladies. Le phylloxéra qui a ravagé les vignes des pays producteurs de l’Ouest européen entre la fin du XIXe et le début du XXe aura empêché de voir se développer de tels ceps de vigne.
Un vignoble vieux de 200 ans
Mais quelques exceptions nous permettent de déguster des vins issus de très vielles vignes. C’est le cas dans l’appellation Saint-Mont, voisine de notre région. La vigne gersoise de Sarragachies, dont les pieds ont plus de 200 ans, produit encore son nectar. Ce vignoble de 600 pieds, véritable patrimoine gascon, serait le plus ancien de France. Une particularité qui lui a permis d’être classé en 2012 sur la liste des Monuments historiques.
Encore plus ancienne : une treille plantée sur la place de la Victoire, à Bordeaux, à la fin du XVIIIe. Elle offre à chaque vendange une dizaine de bouteilles du très vieux cépage cruchen-nègre qui rejoignent les caves municipales du Palais Rohan. À défaut d’être immortels, ces pieds de vigne auront bientôt donné des grappes à une dizaine de générations.