Man scientist in uniform is holding test tubes at laboratory. Medicine and research in chemistry

En travaillant sur le design des molécules, des chimistes parviennent à créer des nouvelles familles chimiques. L’objectif : relever ce défi de la synthèse moléculaire et trouver de nouvelles applications. Plongée au cœur du projet de recherche CANaRi du Centre de recherche Paul Pascal, avec une interview du doctorant Luc Soliman

Pourquoi travailler sur le design moléculaire ?

Il faut savoir qu’en chimie les propriétés sont souvent apportées par la position des électrons. Jouer sur la structure permet de contrôler les propriétés et donc généralement pour avoir des nouvelles propriétés, on va essayer de concevoir des nouvelles formes. Pour cela, en chimie organique, on va d’abord imaginer d’autres structures puis imaginer leur formation par une succession de réactions chimiques à partir de plusieurs petits composés qui sont facilement accessibles. On essaye ensuite de reproduire tout cela en laboratoire pour réellement obtenir les composés voulus, comme des lego microscopiques que l’on va assembler.  Pour faire cet assemblage de blocs de lego, il y a beaucoup de techniques qui existent. Nous, nous avons notre propre version qui est une version modernisée d’une réaction historique qui s’appelle la réaction de Perkin.

C’est un challenge synthétique : on créé quelque chose qui n’existe pas. A l’école, nous apprenons que les molécules dites « aromatiques », comme le benzène, ressemblent à un hexagone avec des électrons mobiles et sont toujours planes. Ces molécules peuvent être plus étendues et composées de plusieurs hexagones adjacents. Mais on s’est rendu compte qu’en jouant sur ces assemblages, on arrive à leur donner une structure en hélice ; et à les tordre pour leur donner une forme de ruban cyclique. On souhaite aller plus loin en introduisant une torsion dans ces rubans cycliques qui nous donnerait de nouvelles structures inexistantes aujourd’hui.

Pourquoi introduire une torsion dans les rubans cycliques ?

Cela permet d’avoir des structures qui sont différentes de ce que l’on peut retrouver. Généralement, un ruban cyclique comme la plupart des objets cylindriques vont avoir 2 surfaces, une surface extérieure et une surface à l’intérieur. Mais si on fait un ruban avec un nombre de torsions impair, alors on va se retrouver avec ce qui est appelé un ruban de Möbius. Il ne va avoir qu’une seule surface et qu’un seul bord. Si vous mettez votre doigt sur un point de la surface du ruban, il faudra faire deux fois le tour du ruban pour revenir au point de départ.

Il faut s’imaginer que les molécules ont un sens un peu comme les rubans avec une surface extérieure et intérieure. Avec ce genre de ruban, cette notion est floutée parce que cela voudrait dire qu’il y a un endroit où il y aurait une inversion du sens.

C’est pour ces raisons que l’on souhaite synthétiser ce genre de structure pour observer ce type de phénomène assez contre-nature.

Quelle opportunité scientifique cela apporte-t-il ?

C’est un défi synthétique de créer quelque chose de nouveau qui n’existe pas. Et il faut savoir que ces types de composés sont souvent des composés qui sont émissifs. C’est à dire qu’ils peuvent émettre de la lumière. Et en raison de leur structure, en forme d’hélice, elles peuvent interagir avec la lumière polarisée.

Nous sommes dans la recherche fondamentale. On réalise ces créations pour leur géométrie atypique et nouvelle. Mais en imaginant une structure idéale, avec de très bonnes propriétés de fluorescence, on pourrait imaginer une application par exemple dans les OLED qui composent les écrans de certaines télévisions. On pourrait alors combiner ces propriétés OLED avec la lumière polarisée. Cela trouverait alors une application, dans un cas idéal, dans des télévisions 3D.

Propos recueillis
par Alexandre Marsat

Le projet de recherche CANaRi du Centre de recherche Paul Pascal (CNRS – Université de Bordeaux) est financé dans le cadre des projets ANR. Il est porté par Fabien Durola, auprès duquel Luc Soliman réalise sa thèse.

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