3 QUESTIONS A. En France, les conseils d’administration des grandes entreprises se féminisent de plus en plus. On y recense en 2024 près de 46 % de femmes. Mais sont-elles de meilleures dirigeantes que les hommes ? Nous avons posé la question à Catherine Pourquier, enseignante chercheuse au département management, stratégie et entrepreneuriat au sein de la Burgundy school of business (ex école supérieure de commerce de Dijon)          

Quels effets a eu la loi qui impose depuis 2011 un minimum de 40 % de femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises ?

Catherine Pourquier : Cette loi est intéressante car elle a donné une direction claire, en explicitant qu’il y avait alors trop d’hommes dans les comités de direction qui sont des lieux de pouvoir. Il s’agit donc d’une loi très importante, et on assiste depuis à une vraie féminisation des postes de management. Mais il ne faut pas voir cela comme quelque chose d’uniquement d’artificiel, même si la loi Rixain de 2021 prévoit des sanctions si ce quota de 40% de femmes n’est pas respecté à horizon 2030.

Cette promotion des femmes à des postes de pouvoir se fait aussi de manière naturelle avec l’arrivée des nouvelles générations qui voient ce phénomène de féminisation de manière plus favorable que leurs prédécesseurs. Les écoles et les entreprises ont aussi peu à peu mis en place des systèmes de mentorat afin d’inciter davantage les femmes à oser se positionner comme leader. 

Les femmes dirigeantes se comportent-elles différemment des hommes qui occupent des postes de pouvoir ?

Catherine Pourquier : La manière de diriger n’est pas uniquement liée au genre, il s’agit aussi d’une histoire de personnalité et de trajectoire de vie. Ce que j’observe à travers les études que je mène c’est que chaque individu peut développer une forme de leadership unique. Il y a des dirigeants introvertis, et d’autres qui sont plus extravertis.

Les femmes leaders ont par contre davantage tendance à prendre en compte l’ensemble des personnes dans un groupe. Elles ne sont pas obnubilées par le fait de gagner à tout prix, ce qui compte pour elles c’est de gagner ensemble. Ces femmes leaders impulsent donc une dimension plus collective dans les entreprises, à l’opposé de certains dirigeants masculins qui tendent parfois vers l’individualisme. Cette approche est essentielle dans la conduite d’un changement responsable en matière de protection de l’environnement ou de bien-être au travail par exemple.

La société accepte-t-elle désormais plus facilement de voir des femmes diriger des entreprises ?

Catherine Pourquier : Les premières femmes qui ont intégré les comités de direction ont notamment eu tendance à copier certains comportement masculins, dans l’espoir d’être plus facilement acceptées dans ce milieu d’hommes.

Elles étaient en quelque sorte en position de survie, et certaines ont confié en avoir souffert. Mais ces pionnières ont ouvert la voie aux générations suivantes dont on n’attend plus qu’elles se comportent comme des hommes, mais d’êtres simplement elles-mêmes.

Et cela correspond parfaitement au style de management qui prend aujourd’hui de plus en plus d’importance : le leadership authentique. Désormais la priorité pour un leader, dans le monde de l’entreprise mais aussi en politique, c’est d’être soi-même.  

Propos recueillis
par Thomas Allard

Avec le soutien du ministère de la culture

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