C'est par des hydroliennes autonmes capables de fournir de l'énergie portable que VH93 a débuté.

Des hydroliennes à faible impact et recyclables. C’est de là qu’est parti VH93. Avant de glisser vers un ambitieux projets de vaisseaux producteurs d’énergie renouvelable. A la limite des possibilités de l’avenir

« Comme la plupart des chercheurs français, j’ai travaillé pour le pétrole, pour l’armement ou pour l’automobile. Mais je suis depuis longtemps un techno-écologiste et je voulais que toutes ces recherches servent à quelque chose », introduit Stephan Guignard fondateur de l’entreprise d’hydrolienne houlomotrice en matériaux biosourcés VH93. En particulier à éviter autant que possible que la production d’énergie soit l’autoroute de la fin du monde. « L’éolien et le solaire avaient déjà bien démarré. Il restait l’eau qui était peu exploitée. »

Un nom et une invention ressortis des placards

C’est en 2010 que Stephan Guignard lance VH93 grâce à deux éléments anciens et presque oubliés. Victor Hugo tout d’abord, qui dans son roman « 93 » écrivait « utilisez la nature, cette immense auxiliaire dédaignée. Faites travailler pour vous tous les souffles de vent, toutes les chutes d’eau ». Voilà pour le nom de l’entreprise.

La technologie, celle du rotor Savonius, elle date d’à peine plus tard, en 1924 et a été inventée par Sigurd Savonius. « Elle correspondait à la technologie que je souhaitais : low-tech, simple, facile à fabriquer. Son seul défaut, c’est d’avoir un rendement faible, entre 15 et 20%. » C’est sur ces pales à axe vertical que Stephan Guignard travaille et qu’il crée une hydrolienne souple, pour laquelle la pale qui ne prend pas le courant se courbe assez pour ne pas freiner le travail de celle qui le prend. « Je tablais sur un rendement de 30%. On a eu 100%. » 

Mais l’exigence technique est une chose, l’autre est la nécessité écologique. « Si on veut faire du renouvelable, il faut des critères exigeants. » En particulier en analysant le cycle de vie du produit. Sa fabrication ne doit pas consommer plus d’énergie qu’elle n’en produit. Pour ce faire, l’hydrolienne est bio-sourcée : fibre de lin, résine epoxy et acide polylactique, issu de la chimie du maïs.

Son utilisation ensuite, ne doit pas perturber le milieu. Les pales savonius tournent lentement et ne gênent pas la faune « parce que si on chasse les poissons, il faudra aller le pêcher ailleurs pour se nourrir et utiliser des énergies supplémentaires. » Enfin, là où l’homme moderne a du mal généralement, c’est avec la fin de vie. Les hydroliennes en matériaux bio-sourcé se recyclent par broyage, sans chimie pour le recyclage.

Aller récupérer l’énergie des vagues

Pendant 10 ans, VH93 offre ses solutions légères et modulables, du trekkeur qui veut s’éclairer à la ville qui souhaite utiliser sa rivière, aidé en cela par a société d’accélération du transfert de technologies (SATT) SATTSE, qui l’aide à déposer les brevets correspondant à l’amélioration de cette technologie, pour passer d’un rendement faible à celui, optimal, qui est le sien aujourd’hui.

Avec des voiles qui captent l’énergie du vent et, en dessous, des rotors celle des vagues, les bateaux projetés par VH93 fournissent l’énergie nécessaire pour dessaler l’eau de mer

Mais l’accélération du changement climatique pousse Stephan Guignard à être plus ambitieux. Et à vouloir créer des navires de 300 mètres de long, équipés de pales savonius pour produire de l’énergie : « On pourrait aller récupérer l’énergie des vagues. » A ceci prêt que les critères environnementaux ne sont pas optimums car les solutions de batterie actuelles sont polluantes et ont un rendement énergétique encore trop faible. Or, pour utiliser l’énergie fabriquée en mer, il faut la stocker pour revenir à terre.

Changement de cap

Alors le projet change de cap « mais ce n’est pas un pis-aller » et Stephan Guignard décide d’utiliser l’énergie de ces vaisseaux à concevoir pour dessaler l’eau de mer. Une opération généralement faite sur la terre ferme avec des énergies fossiles et dont le sel est rejeté à proximité des côtes, avec un gros impact négatif sur l’écosystème côtier. Ses « bateaux de dessalement » utiliseraient l’énergie des vagues pour dessaler l’eau et rejetteraient le sel en pleine mer. Pour Stephan Guignard, 4 000 de ces vaisseaux suffiraient à répondre aux besoins mondiaux en eau douce d’ici 2030. Une nécessité d’autant plus grande que les sécheresses drastiques impactent même le sud de la France. Ni Victor Hugo ni Savonius n’avaient pensé que leurs idées feraient couler de l’eau.

Jean Luc Eluard

Avec le soutien du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation

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