Ça peut être la meilleure ruse pour arrêter de courir : « J’ai un point de côté ! », et tout le monde respecte la souffrance. Plus modéré que « Je viens de me casser la rotule », le point de côté est le chemin de croix des sportifs du dimanche même s’il touche rarement les pros de la course.
En fait, ses origines sont assez disparates, et il n’y a pas de certitude absolue sur ce désagrément. Le plus fréquemment, le point est dû à une crampe de l’un des plus discrets mais des plus essentiels des muscles, le diaphragme. Situé juste sous les poumons, c’est lui qui régule la respiration. Lorsqu’il se contracte, il descend et laisse de la place pour que l’air puisse entrer dans les poumons. Inversement, lorsqu’il se détend, il remonte et expulse l’air. Au repos, une vingtaine de fois par minute, mais pendant l’effort ça tourne autour de la centaine de fois, et, comme tout muscle ordinaire, il peut être pris de crampes : le sang n’arrive plus à lui fournir suffisamment d’oxygène pour éliminer l’acide lactique produit par l’exercice physique, et la douleur apparaît.
Comme une crampe ordinaire, ça fait sérieusement mal et cela constitue 90 % des points de côté. Elle arrive donc essentiellement à ceux qui n’ont pas trop l’habitude de faire du sport. Cela survient d’autant plus facilement lorsque l’on est en train de digérer. Mieux vaut oublier le petit jogging digestif après ripaille, parce que, pendant la digestion, l’organisme dirige prioritairement le sang vers les intestins, qui sont en train de travailler, et il n’apprécie que modérément de devoir fournir double dose de boulot pour les autres muscles, diaphragme compris. Donc moins de sang, moins d’oxygène, et donc crampe.
Le foie et la rate
Mais il existe d’autres origines au point de côté, toujours dues à un manque de pratique sportive : le foie (à droite) ou la rate (à gauche) peuvent soudainement se gorger de trop de sang apporté par l’effort sans qu’ils aient le temps de l’évacuer. Ils gonflent alors et appuient sur le diaphragme, encore lui, qui ne peut plus fonctionner normalement, et paf ! douleur.
En tous les cas, le point doit disparaître dès que l’on cesse de courir, même s’il peut réapparaître dès qu’on reprend l’effort. Si jamais ça ne passe pas, mieux vaut consulter un médecin, ça peut cacher quelque chose de plus ennuyeux. Quoi qu’il en soit, si l’on veut éviter le point, mieux vaut appliquer la philosophie de Churchill qui, quand on lui demandait le secret de sa forme à un âge avancé, répondait : « No sport ! »
Jean-Luc Eluard