Les études se multiplient et se contredisent sur les bienfaits de la position idéale devant son écran d’ordinateur. La position debout est depuis peu mise en avant comme une alternative aux douleurs notamment dorsales. Qu’en est-il vraiment ? Réponse de Pierre Lanusse, médecin du sport spécialiste en posturologie
« Il est faux que croire que si l’on se met à travailler debout au lieu de travailler assis, on va modifier sa posture. La posture est prédéfinie. On ne peut pas la modifier comme on ne peut pas décider de modifier le rythme cardiaque d’une personne.
Si on demande à une personne d’essayer de travailler devant un écran, debout, il va en effet se tenir de façon martiale au début. Et en quelque sorte se mettre au garde à vous, par un effort de sa volonté, mais dès que son cerveau sera absorbé par la tâche qu’il réalise sur l’écran, il ne se préoccupe plus de la posture.
Être assis ou debout ne suffit pas à changer les habitudes de posture et à régler ses problèmes, par exemple, de lombalgie ou aux cervicales.
La posture, c’est un match contre la gravité
La posture, c’est comme un match contre la gravité. Il faut lutter contre elle en se tenant le plus harmonieusement possible. Chacun d’entre nous a une posture différente. Elle dépend de quatre capteurs : les yeux, l’oreille interne, les appuis de la mâchoire et les pieds. Or, la plupart des individus (près de 9 sur 10), ont des défaillances de ces capteurs. Ils peuvent souffrir de myopie, avoir une mâchoire avec un menton très en avant, une jambe plus courte, etc.
Le cerveau enregistre ces défauts et les traduit dans la posture adoptée. Dans bien des cas, il cherchera à les compenser, par exemple, en positionnant une épaule plus haute que l’autre pour aligner la vue. Cette compensation, dont l’individu ne se rend pas compte, se produit que l’on soit assis ou debout devant un écran.
Elle peut à l’origine de douleurs qui peuvent se révéler des années après, lorsque le cerveau ne sait plus compenser ces défauts. Le poste de travail, qu’il soit assis ou debout, en position statique, est révélateur de ces douleurs mais n’en est pas la cause. Ainsi, il est parfois proposé comme solution de s’asseoir sur un ballon, mais ça ne peut pas marcher non plus.
Un manque de muscle lié à la sédentarité
Il y aussi la problématique des gens sédentaires qui n’ont pas de défauts posturaux mais qui manquent de muscles, par l’âge, le surpoids, un alitement prolongé…. Dans ce cas, faire du sport, se remuscler est une solution et l’on peut choisir ensuite de travailler aussi bien assis que debout. Tout est possible.
J’ai l’exemple de deux architectes, qui, pour se tonifier, travaillent devant leur écran tout en marchant sur un tapis roulant, ce qui leur convient et a résolu leur problème. C’est aussi une très bonne idée de faire des séances de pilates quotidiennement. Cela permet de travailler les muscles profonds.
En revanche, si on a un défaut postural lié à une défaillance aux yeux, à la mâchoire, une scoliose, la solution n’est pas le sport, mais, selon les individus, des lunettes, un implant dentaire, des séances chez l’orthoptiste, chez l’orthopédiste, voire chez un hypnotiseur pour traiter un traumatisme émotionnel qui peut aussi jouer sur la posture… Donc, le sujet n’est pas de changer de bureau mais de se poser la question « pourquoi ai-je mal à cet endroit ? » Quand on trouve et que l’on traite ce problème, cela peut être rectifié ».
(*) Pierre Lanusse est diplômé en médecine manuelle, en ostéopathie, en podologie, en préparation physique et en traumatologie du sport et auteur de « Docteur, vous êtes mon dernier recours » (janvier 2023, Ed. Baudelaire)
Marianne Peyri