Forcément, les plus desprogiens des fidèles lecteurs du « Flâneur » s’amuseront à faire une coquille (1) à « coquilles ». La blague prompte à faire rire la tablée, à la fin de l’apéro, avant d’attaquer le repas de Noël et son traditionnel plat d’huîtres, tombe finalement à pic. Eh oui, la petite bébête molle que vous avalez vivante a quelques petits problèmes de reproduction ou plutôt de biologie. Et ce n’est pas près de s’arrêter, à cause des acides.
Non pas ceux de vos sucs gastriques. Là, il n’y a plus rien à faire pour les sauver. Mais ceux qui viennent de l’acidification de l’océan leur sont fatals. Il y a trois ans, des études ont été menées à la suite d’une surmortalité de naissains d’huître, dans un bassin de production de l’Oregon, sur la côte pacifique américaine.
Rares étaient les larves d’huître qui survivaient dans l’eau de mer, créant une véritable chute de la production. Vingt-quatre heures seulement après la naissance de ces bébés huîtres du Pacifique (Crassostrea gigas), l’acidité de l’océan vient perturber la fabrication de leur coquille qui commence tout juste à se former, les confrontant à une prédation par les crabes et à une mort certaine. La présence de calcaire diminue
Mais pourquoi diable son eau protectrice et nourricière la tue-t-elle ? La croissance future du mollusque se joue dans ces premières heures. La larve se sert du carbonate de calcium, qu’elle précipite pour construire sa coquille, qui fait alors 90 % de son poids. Mais l’eau étant plus acide, les protons sont présents en plus grand nombre et lésions carbonates diminuent. Bref, l’eau plus « corrosive » fait diminuer la présence de calcaire. Les coquilles sont donc fabriquées plus difficilement. Il faut plus d’énergie.Un impact qui n’est pas près de s’enrayer car la hausse de l’acidification de l’océan provient du CO2 émis par l’homme.
Ces rejets de gaz carbonique sont absorbés à 25 % par les mers. On pourrait les remercier d’éviter ainsi que le réchauffement de l’atmosphère ne soit pas encore plus important, mais les effets sont néfastes pour les espèces marines. Le CO2, passé dans l’eau, se dissout, produit de l’acide carbonique et la rend plus acide : cela fait baisser son pH.
Depuis l’ère industrielle, cette acidification a augmenté de 30 %. Avec le verre de trop à l’apéro du réveillon, si vous voulez que les huîtres restent sur la table, c’est un argument de plus pour laisser la voiture.